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Semences : une dichotomie permanente Il existe deux grandes catégories de semences : les semences paysannes (cf. lexique ci-dessous) sélectionnées et multipliées par des paysans dans leurs champs de culture et les semences sélectionnées en station d’expérimentation ou au laboratoire par des semenciers professionnels, privés ou publics. Entre ces deux grandes catégories, on trouve les semences de ferme : au départ issues des obtenteurs (donc de la deuxième catégorie), elles sont ensuite reproduites à la ferme. Ces semences de ferme coévoluent avec les années dans les champs des paysans et deviennent plus ou moins rapidement (selon le mode de culture, leur taux d’allogamie et la sélection massale des paysans) des semences paysannes (voir ci-dessous). La majorité des semences et plants actuellement utilisés dans le monde est produite par les paysans eux-mêmes. Ces semences multipliées par les paysans proviennent essentiellement de trois sources : (1) des variétés traditionnelles ou modernes : souvent qualifiées de locales car sélectionnées et conservées dans des territoires identifiés, elles évoluent plus ou moins rapidement dès qu’elles sont cultivées dans d’autres territoires ; (2) des variétés issues de l’amélioration des plantes conventionnelles (sélection et croisements) publiques nationales ou internationales [1]. Dans les pays du Sud, les variétés des obtenteurs publics n’ont souvent pas été maintenues et ont « évolué » dans les champs des paysans. Elles se sont aussi croisées (selon leur % d’allogamie), avec les variétés paysannes. On pourrait les qualifier de « semences paysannes récentes ». (3) des variétés d’obtenteurs multipliées à la ferme par les paysans. On parle alors de « semences de ferme ». Si ces semences de ferme sont multipliées sans être renouvelées par achat de semences certifiées, elles évoluent aussi vers des « semences paysannes récentes ». Ces variétés ont évolué et ne sont plus identiques à la variété initialement diffusée : quelques pays admettent qu’il n’y a plus de droit de licence afférent vu qu’elles ne sont donc plus identiques à la variété initialement diffusée. Selon l’ONG Grain [2], les semences certifiées ne représentent que 32,5 % de toutes les semences utilisées au niveau mondial. Selon V. Beauval [3] il est probable que cette proportion soit nettement inférieure à 32,5%, car il ne faut pas seulement prendre en compte les semences paysannes. Il faut aussi prendre en compte les semences multipliées à la ferme mais issues de variétés d’obtenteurs privés ou publics [4]. Les semences paysannes ne sont pas protégées par des droits de propriété industrielle et s’échangent entre agriculteurs en respectant ou non les législations nationales, et souvent en respectant dans de nombreux pays « du Sud » les droits collectifs, souvent oraux, des communautés qui les ont sélectionnées et les conservent. En France, par exemple, avec la nouvelle loi biodiversité de juillet 2016, l’échange de semences n’appartenant pas à une variété protégée par un certificat d’obtention végétale est permis dans le cadre de l’entraide entre paysans [5]. Les entreprises semencières cherchent a) à réduire la place qu’occupent ces semences paysannes ou à les interdire ; et b) à contrôler l’usage des semences de ferme. Pour cela, elles ont élaboré, en lien avec les États, des outils pour encadrer juridiquement la reproductibilité des semences. Des verrous biologiques, tels les hybrides F1, ont aussi été créés. - Les outils juridiques sont : le catalogue et/ou la certification [6], les certificats d’obtention végétale (COV) [7], les brevets [8] et les règles sanitaires, environnementales et de biosécurité. Les catalogues officiels et la certification ont été mis en place pour bien définir les variétés y figurant en priorisant leur homogénéité. Ont été aussi définies des normes de qualité sanitaire des semences et plants de ces variétés. Si ces catalogues officiels et la certification ont pu jouer un rôle économique (garantie variétale, germinative et sanitaire des échanges commerciaux), ils sont depuis plusieurs années critiqués car ils ne sont adaptés qu’aux variétés et semences d’obtenteurs et excluent les semences paysannes et, plus globalement, la nécessité d’accroître la biodiversité cultivée [9].

Sous categorie : Seeds
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